Géologie de la falaise du Caillaud

Une étude complète réalisée par Guy Estève.

Les terrains qui forment la falaise du Caillaud ont été déposés par la mer un peu avant la fin du Secondaire alors qu’elle découvrait progressivement la bordure nord du Bassin d’Aquitaine (étage géologique du Campanien, environ 70 millions d’années/Ma).

Après leur dépôt, les terrains ont été plissés par suite de la formation de l’anticlinal de Jonzac (Tertiaire). Situés sur le flanc méridional de cet anticlinal, ils présentent un faible pendage (2 à 3 °) vers le nord-ouest. Celui-ci est accru par la perspective sur l’image 3 de la figure 2. Des cassures importantes (failles) ont provoqué un décalage des couches (strates). Ainsi, les couches de la « falaise de Talmont l’église » ne sont-elles pas dans le prolongement des couches du Caillaud. Une faille, visible autrefois à l’entrée du hameau du Caillaud, a décalé vers le bas les terrains de Talmont.

Le découpage stratigraphique basé sur les caractères lithologiques (nature des roches) et biologiques (biozones) distingue 6 unités dont seuls les Campanien 3 et 4 sont représentés ici avec, en particulier, les biozones CIV et CV. La révision effectuée en 1996 par J.- P. PLATEL (auteur de la carte géologique Saint-Vivien-de-Médoc Soulac-sur-Mer, 1972) a fait disparaître le « Maastrichtien basal » affleurant sur le plateau et en sommet de falaise. Ainsi les terrains du Caillaud appartiennent-ils au Campanien supérieur (Campanien terminal) dont les derniers représentants sont mieux visibles sur les falaises plus au nord de cette rive droite de Gironde jusqu’à Saint-Palais.

Lithologiquement, la série est assez monotone. Il s’agit de calcaires plus ou moins argileux et, suivant la teneur en argiles, on passe de calcaires crayeux à des calcaires argileux puis marneux et à des marnes. La biozone CV dont la stratigraphie est nette montre une alternance de calcaires crayo-marneux (assez forte teneur en calcaire / CaCO3 : carbonate de calcium, environ 75%) plus ou moins durs et de calcaires argileux blancs jaunâtres. Les profils (figure 3) permettent de bien distinguer les couches tendres, plus facilement érodées, et les couches plus dures en saillie.

La falaise bordant la Gironde culmine à 25 m IGN 69 soit un front de plus de 20 m. Le pied est couvert par endroits d’éboulis (figure 1) comme à la base de la « falaise est » vers Barzan. En dehors des périodes de fortes agressions marines, une érosion continue se fait par le haut, la roche fissurée étant découpée en blocs par les eaux d’infiltration.

Outre le fait que ces éboulis protègent le pied de la falaise, ils fournissent des fragments de roches de la partie supérieure dans lesquels sont des fossiles très difficilement accessibles autrement.

 

Fig. 1. Cônes d’éboulis au pied de la falaise. ►

Fig. 2. Les falaises ouest, est et celle bordant la Gironde. ▼

Fig. 3. La stratification de la « falaise ouest » et sa correspondance dans la paroi du chai.▼

La « falaise ouest » bordant la baie du Caillaud est plus facile d’accès et présente une courte séquence de succession stratigraphique. Dans le fond, la falaise est morte, son pied n’étant atteint par la mer que rarement du fait du comblement progressif de cette baie qui en exhausse le fond.

Au niveau des premiers carrelets sur pontons (image 1 de la figure 2), la base de la falaise présente un trottoir de calcaire marneux (pleines mers de marée moyenne). On peut y observer de nombreuses huîtres dont certaines de grande taille (voir plus loin). Ces calcaires se retrouvent au-dessus en gros bancs également fossilifères. Il y a ensuite alternance de bancs plus durs et de marnes. Les silex forment des rognons parfois gris, branchus, répartis dans la roche, sans stratification.

À la partie supérieure, le débit en plaquettes peut être un héritage de la dernière période glaciaire du Quaternaire (la région était alors en zone périglaciaire). Cet aspect serait dû au développement du réseau de fissures présentes naturellement dans la roche sous l’action répétée des gels et dégels. Vers le haut, on passe ensuite progressivement du sous-sol (roche mère) au sol, la terre de Champagne argilo-calcaire, peu épaisse.

La nature argileuse de ces calcaires explique la présence de poches de dissolution ou de décarbonatation mises en évidence à la faveur du creusement d’un chai en sous-sol.

Les eaux de pluie s’infiltrant dans le sol dissolvent plus ou moins complètement le calcaire. Les argiles occupent alors les espaces créés par cette dissolution en les colmatant. Dans les parties les plus décarbonatées de ces poches, la pelle de l’engin a dégagé une poudre ocre à brune dont la coloration est due à des oxydes de fer contenus dans ces argiles (les smectites en particulier). La stratification d’origine peut disparaître mais elle a pu être conservée partiellement au voisinage. On observe alors des couches ocres (restes de calcaires marneux ou de marnes) ou blanches (restes de calcaire crayeux) en alternance (figure 3).

La variété et la richesse des fossiles s’opposent à la relative monotonie des roches.

Après une étude uniquement descriptive des fossiles par les paléontologues, des sciences nouvelles sont nées pour les replacer dans leurs environnements climatique et marin au cours des périodes géologiques. Ainsi des études dynamiques des peuplements fossiles s’inscrivent-elles dans une véritable approche écologique de ces peuplements. En ce qui concerne les huîtres ou les vertébrés par exemple, les falaises de la Gironde fournissent un matériel de choix pour de telles études.

Rappels.
Comme les espèces vivantes contemporaines, les fossiles ont chacun un double nom : le premier est celui du genre (Pycnodonte), le second celui de l’espèce (vesicularis). Lorsque leur détermination n’a pu être faite précisément, seul le nom de genre est donné. Le fossile est alors nommé par son nom de genre suivi de sp. qui signifie espèce (sous-entendu non déterminée). Ainsi les oursins du genre Phymosoma comprennent plusieurs espèces que seul un spécialiste saura déterminer.

Comme les autres noms d’espèces, ceux des fossiles évoluent. Nous avons adopté la nouvelle nomenclature conscient des difficultés que pourront rencontrer les plus anciens.

La liste des grands groupes de fossiles animaux présents au Caillaud, très partielle, est limitée aux fossiles les plus fréquents, ceux qui sont faciles à trouver et parfois à déterminer.

Guy Estève

 

Crédit iconographique
Michel Guillard
Guy Estève
Michel Le Collen
Géoportail IGN